Formée dans le club tarnais, Manon Cazes joueuse cadre de l’ASPTT Football de l’Albigeois, a accordé une interview à notre média partenaire Le #MagSport. Pour la native d’Albi, la situation actuelle des rouges et jaunes est un crève-cœur et l’affecte profondément. Face au péril sportif qui guette ce club dont l’histoire avec le foot féminin est séculaire, la doyenne (en nombre d’année passée au club) tire la sonnette d’alarme et convie ses coéquipières à renverser sur le pré, la dynamique négative qui les enlise petit à petit vers la relégation. Comme sur les pelouses de D2F ou de D1F, cette leader de combat, veut se battre jusqu’au dernier souffle pour préserver l’héritage sportif d’un club, qui tutoyait encore récemment, le gotha du football hexagonal.
Manon, toi qui a tout connu avec l’ASPTT, des entrainements à l’école de foot lorsque tu étais enfant à la D1, comment tu vis la situation du club en ce moment ?
La situation du club m’affecte énormément, être relégué en R1, c’est pour moi inimaginable. Il y a tellement de personnes qui oeuvrent pour améliorer le club et nos conditions que nous avons l’obligation de respecter leur engagement et de les RESPECTER en tant qu’individus. Je vivrais la relégation en D2 comme un échec, une trahison même de ma part. Ce club m’a énormément apporté que ce soit sur le plan sportif mais aussi humain, qu’il est impossible pour moi, d’être l’une des joueuse de l’équipe qui amène Albi en R1.
Comment réagit le groupe à la situation actuelle de l’équipe ?
La situation est extrêmement complexe pour nous… Alors, il est vrai que notre groupe est jeune, que notre équipe manque de niveau, mais, il est bien trop facile de se cacher derrière ses excuses. Ne pas avoir conscience de la gravité de la situation du club et le « je m’en foutisme » sont pour moi les réels problèmes de notre équipe. On manque de rigueur pendant les séances d’entrainements, de là à dire que qu’on ne l’est jamais ? Peut-être, du moins on ne l’est jamais ensemble. Si on ajoute le manque de maturité, qui est une véritable problématique dans cette équipe, ça devient très compliqué de bien travailler et avoir des résultats. Nous sommes sans cesse en train de nous déresponsabiliser. Comment être exigeante envers tes partenaires quand tu ne l’es pas envers toi-même ? Dès qu’il y a des critiques constructives, il faut absolument qu’elles soient entendues et acceptées. En résumé, nos comportements ne sont pas dignes de joueuses de D2. Nous devons changer notre posture et notre état d’esprit, pour faire des semaines ENTIERES d’entrainements de qualités. Nous avons la chance d’avoir deux semaines pour préparer la réception de La Roche sur Yon, nous devons AGIR . Et j’y crois !
Comment tu expliques cette situation ? Beaucoup parle d’un déficit de qualité technique, d’un manque d’envie, de largesse défensive ou encore du manque d’efficacité offensive mais quelle est ton explication ?
Comment marquer sans mouvement offensif ? Comment faire un « clean sheet » si à chaque match les marquages sur coups de pieds arrêtés ne sont pas effectués ? Ces deux exemples qui sont les véritables points noirs de notre équipe sont très significatifs et soulèvent à aucun moment le niveau de l’équipe. Ça vient plutôt interroger l’envie de se surpasser, la communication, l’intelligence de jeu et le respect des consignes de l’équipe. Ces des domaines dans lesquels nous sommes inexistantes le dimanche ou de manière discontinue.
Si Albi veut réagir et se sauver, qu’est ce qui doit changer ? Que doit changer le club, le staff, les joueuses ?
L’absence de joueuses expérimentées dans notre équipe est une véritable problématique. Mais en parler sans cesse, c’est juste une perte de temps. On ne peut plus agir et dessus et nous, joueuses, on a aucun contrôle dessus. La réflexion doit s’articuler autour de nous, nous, joueuses portant le maillot rouge et jaune, il est temps de devenir des COMPETITRICES. Bien que le dialogue et l’écoute, soient deux idées directrices des membres du staff, nous n’avons pas su bien les exploiter, ceci s’explique surement par notre manque de maturité. Aujourd’hui, il est temps d’arrêter de se faire des cadeaux et de se « brosser dans le sens du poil », sur le rectangle vert nous devons nous dire les choses, dans le seul objectif d’être à notre meilleur niveau. Concernant, les changements que je souhaiterai au niveau du staff, ça ne sert à rien d’en parler ici, il sera bien plus constructif pour l’équipe d’échanger directement avec eux pour réussir à trouver des solutions. Au sein du club ? Ca ne me concerne pas et si c’était le cas je donnerai mon avis à l’intersaison, mais pour le moment ma préoccupation première est de prendre des points.
Si tu avais un message à faire passer à l’ensemble de tes coéquipières, ce serait lequel ?
Affrontons le problème ensemble, responsabilisons nous ensemble et gagnons ensemble ! Si nous allons chacune puiser les ressources au plus profond de nous, nous allons y arriver. Je le VEUX et j’y crois ! Nous sommes arrivées cette année l’équipe était en D2, on sait pertinemment qu’à la fin de l’année que certaines vont partir, d’autres resteront l’année prochaine mais une chose est sure c’est que chacune d’entre nous doit avoir le désir, l’ambition, la volonté, le devoir de laisser notre club à ce même niveau.
Les matchs qui arrivent sont contre des concurrents directs : La Roche, Toulouse, Bergerac. Est-ce que ces rencontres scelleront le destin de l’ASPTT ?
A ce jour, on a une seule victoire, c’est une honte ! Alors qu’importe l’adversaire nous devons prendre des points. Le match nul ne nous intéresse plus, seul l’enchainement de victoires permettra le maintien. Que ce soit Issy-Les-Moulineaux ou Bergerac, l’objectif est le même, prendre les trois points.
Tu es issue de la formation albigeoise, tu as connu l’épopée en D1F. N’aurais-tu pas l’impression d’un énorme gâchis et d’un héritage des générations bafoué en cas en descente en R1 ?
C’est impensable pour moi. Au-delà des nombreux moments sportifs inoubliables que j’ai connus, l’ASPTT m’a beaucoup apporté humainement. Par son intermédiaire j’ai noué de véritables amitiés, des personnes m’ont vu grandir, je ne peux pas les décevoir. C’est une obligation pour moi de laisser ce club en D2. La majorité des filles qui sont passées à Albi en garde de très bons souvenirs, parce que malgré le peu de moyen, à l’ASPTT, on s’y sent bien et je suis réellement convaincu du potentiel de ce club. Si les réflexions continuent quant à sa structuration, Albi peut faire partie des clubs phares de D2.
Pour toi, quelles sont les forces de l’équipe ? Sur quoi pouvez-vous vous appuyer pour garder l’espoir d’un maintien ?
La jeunesse ! Mais nous ne l’avons pas exploitée encore. Le fait d’avoir cette fougue et cette hargne le dimanche nous permettra de ramener les trois points. Nous ne pouvons pas faire pire que la situation actuelle, donc nous devons jouer relâcher et chacune d’entre nous doit avoir confiance en ses capacités afin de s’exprimer librement sur le terrain.
Propos recueillis par Romain Brunot
Article rédigé par Loïc Colombié